L’art pour tous, tous pour l’art

L’artiste engagé et président de l’Akademie der Künste Klaus Staeck réussit un dernier coup de maître avant de se retirer de ses fonctions avec Kunst für Alle, visible jusqu’au 7 juin 2015. L’exposition réunit près de 300 œuvres provenant de sa collection personnelle. Elles ont été produites par 150 artistes différents qui, comme lui, ont participé à l’initiative Kunst für Alle. Lancé dans les années 60, le mouvement encore actif aujourd’hui militait pour un changement du monde par les artistes eux-mêmes : démocratisation de l’art, autonomie et indépendance économique de la culture, diffusion plus large des idées… Le symbole de ce mouvement où l’art est politique est l’utilisation du multiple, moyen d’action efficace de cette résistance artistique sous le régime de la RDA.

Également appelé édition, le multiple est une œuvre d’art reproduite en plusieurs exemplaires dont tous sont considérés comme des originaux. Vous en trouverez de nombreux exemples dans les différentes salles de l’exposition, des affiches pour le festival Intermedia’69 aux actions politiques de l’initiative Freiheit statt Strauss. Aktion für mehr Demokratie (1979), en passant par les photos et cartes postales publiées par les artistes. À ces œuvres s’ajoutent objets, dessins, coupures de journaux ou encore lettres manuscrites d’artistes comme Joseph Beuys, Kirsten Klöckner, Daniel Spoerri, Dieter Roth, Nam June Paik, A.R. Penck et Günther Uecker. La création de maisons d’éditions – citons par exemple Reflection Press (1968-2013) ou les Editions Staeck fondées en 1965 sous le nom de Tangente – a également contribué à la diffusion des idées du mouvement et à ouvrir le marché de l’art à un plus grand public.

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Cependant, Klaus Staeck rappelle que rien n’est jamais fini (« Nichts ist erledigt »). Même si l’exposition propose au public un large panorama de l’art et de la société des années 1960 à nos jours, dénonçant notamment les injustices, la pollution, le racisme et la politique de l’Allemagne, le collectionneur invite à réfléchir sur ces souvenirs avec un regard actuel. Malheureusement, bien que certaines œuvres soient facilement compréhensibles, la plupart des travaux affichés n’évoqueront rien au visiteur lambda : il ne sera pas simple de saisir les messages exprimés si l’on ne parle pas allemand (les textes explicatifs sont unilingues), si l’on manque de références et si l’on n’a pas un minimum de connaissances sur la situation politique du pays. Dommage pour une exposition accessible à tous.

A.R

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