À l’occasion de la 70e édition de la Berlinale, la Rédaction de VivreàBerlin dédie la semaine du 20 février au septième art. Zoom sur le plus berlinois des films en lice : Berlin Alexanderplatz, librement adapté du célèbre roman éponyme d’Alfred Döblin.
Des années folles à l’an 2000
Le film, réalisé par le germano-afghan Burhan Qurbani intrigue avant même sa sortie en salles. Et pour cause, le réalisateur s’attaque à un classique de la littérature allemande précédemment revisité par Rainer Werner Fassbinder dans une série en 14 épisodes. Mais là où Fassbinder s’attache à reconstituer l’atmosphère des années 20 dans son film-fleuve d’une quinzaine d’heures, Burhan Qurbani prend le partie de transposer à notre époque les pérégrinations d’un Biberkopf africain, réfugié et sans papiers. Un choix audacieux mais finalement pas si loin de la trajectoire de Döblin, immigré en France de confession juive.
Trajectoires déviantes
À l’instar de son homologue d’encre et de papier qui tombe en déchéance à sa sortie de prison, le Francis du film se bat pour rester dans le droit chemin avant de faire face à l’amer constat que son existence d’apatride ne lui permet pas de gagner honnêtement sa vie. S’ensuit, une descente aux enfers accélérée par sa rencontre avec le dealer Reinhold, compagnon de beuverie et de larcin : un double à l’identité trouble.
Au grè des allées et venues de Franz sur l’Alexanderplatz, Alfred Döblin dresse le portrait d’une ville pauvre et frénétique où les habitants se démènent pour leur survie. Cartographie du mal-être d’une Allemagne qui peine à se reconstruire, et dans laquelle se profilent déjà des horizons bruns. Contexte pas si étranger à une époque de confusion où nos démocraties ne cessent d’être remises en question et où, force est de constater, il n’y a jamais eu autant de murs et de camps de réfugiés.
Lou Antonoff