À Berlin, on fait la fête comme on irait à la salle de sport. Certains se lèvent aux aurores le dimanche pour aller – leggings et baskets aux pieds – danser avec les fêtards de la veille. Tandis que d’autres font des allers-retours à des fêtes de 72 heures grâce au tampon des clubs qui permet de revenir plus tard dans le week-end.
La nuit berlinoise est même entrée dans le patrimoine national. Une institution pour la génération des Easyjet-setters en quête de sensations et d’absolu qui vient s’encanailler le temps d’un week-end dans les bars et les boîtes de la capitale allemande.
Coup de bars
Mais alors pourquoi les bars ne ferment-ils pas à Berlin ? Pour répondre à cette question, il faut remonter au temps où la ville était encore séparée par le mur de la honte. Un couvre-feu très strict régissait les rues, désertes après 21 heures. Les Russes, pour attirer le chaland, décidèrent de repousser l’heure de fermeture de leurs établissements à 22 heures. A l’Ouest on appliqua le même horaire. Alors l’Est accorda l’autorisation d’ouvrir jusqu’à 23 heures.
Pour mettre fin à cette guerre éthylique le patron du syndicat des hôteliers et restaurateurs berlinois, Heinz Zellermayer, alla trouver les commandements des secteurs britanniques et français pour leur proposer de supprimer carrément le couvre-feu. Une audacieuse proposition qui fit face à un refus ferme.
Mais Zellermayer n’avait pas joué sa dernière carte, et prit rendez-vous avec leur homologue américain, le général Howley, un amateur de whisky, qui le reçut autour d’un verre et décida le 20 juin 1949 de lever le couvre-feu pour une période d’essai de 14 jours.
Haro sur la nuit berlinoise !
70 ans plus tard, les nuits blanches allemandes font pâlir d’envie les citadins de toute l’Europe. Rooftops, tiers-lieux, Open-Air, clubs, bars, si la diversité de l’offre est immense, l’écosystème des noctambules berlinois est pourtant en danger.
Fermeture de clubs, augmentation des entrées, tarification de l’iconique tampon qui permettait les allers-retours au Berghain, « Berlin c’était mieux avant » soupirent les berlinois de longue date aux nouveaux arrivants grisés par le sentiment de liberté qui règne encore entre les murs sans fenêtres des clubs berlinois…
Lou Antonoff