Catherine Ricoul a découvert Berlin en 1987, lors d’un voyage d’études et y est retournée à maintes occasions. Car si elle vit à Marseille, la plasticienne fait l’aller-retour entre le Sud de la France et la capitale allemande depuis près de huit ans.
Berlin, ville-mouvement
Assise au soleil à la terrasse du Canapé Rouge – un bistrot français situé à Mehringdamm – Catherine me confie que c’est à Berlin qu’est née en elle la volonté de faire des films.
C’est en voyant la ville changer sous ses yeux à un rythme effréné, qu’armée de sa caméra elle a décidé de « documenter le changement » pour se faire le témoin des pratiques de résistance et de réappropriation de l’habitat en milieu urbain et plus particulièrement sur les rives de la Spree.
Troquer l’immobilité de la photographie et le caractère intimiste de l’Art plastique pour les salles obscures et s’employer à filmer les tentatives de vivre-ensemble en marge du système. C’est le défi que s’est lancé Catherine, qui s’est consacrée pendant cinq ans à dresser le portrait d’une poignée d’irréductibles qui résistent toujours et encore à l’envahisseur capitaliste et à la spéculation immobilière.
La Spree comme fil rouge
Au fil du fleuve et des rencontres, sa démarche artistique a rejoint l’activisme et celle qui se considère aujourd’hui comme « artiviste » se dit plus proche de l’anthropologie visuelle que du reportage.
On retrouve dans ses films, régulièrement projetés lors de festivals à Berlin et ailleurs – Le radeau de la cambuse, Noisy men et Berlin à contre-courant – la thématique de la création comme acte de résistance.
Le fleuve, protagoniste liquide de ces trois films, nous permet de rencontrer en son lit et sur ses rives, Max, le capitaine du Zola, un radeau-maison qui naviguait sur la Spree pour participer à des événements festifs, des iroquois des temps modernes qui construisent un bateau sans argent et avec beaucoup d’huile de coude et les singuliers habitants de yourtes et de tipis qui vivent au bord du fleuve entre friches industrielles et immeubles de luxe, faisant ainsi un poétique pied de nez aux politiques d’urbanisme mises en place par la mairie de Berlin.
Lou Antonoff